Bonne pratique n° 3 : Le jeune expert-comptable automatise, il dispose de temps pour exploiter les données et proposer des prestations personnalisées à ses clients.
Nous retrouvons François MERO, pour ce troisième épisode des bonnes pratiques du jeune expert-comptable avec cette fois-ci un volet sur l’Intelligence Artificielle et l’automatisation appliquées au métier de l’expertise comptable.
François MERO, que faut-il penser de l’intelligence artificielle ; créatrice ou destructrice de valeur ?
L’intelligence artificielle appliquée aux métiers de la comptabilité fait beaucoup parler d’elle. Comme toute innovation technologique, elle suscite beaucoup d’interrogations quant à l’impact de son usage sur la stratégie de développement du cabinet d’expertise comptable et sur le devenir de la valeur ajoutée du collaborateur. Les nombreuses études publiées sur la disparition des métiers de la comptabilité ne rassurent guère la profession et suscitent de nombreuses questions et craintes alors même que la robotisation appliquée à la comptabilité fait son apparition au sein des cabinets. Il est nécessaire de bien comprendre les bénéfices de son usage pour tirer pleinement profit de la valeur qu’elle peut apporter aux cabinets d’expertise comptable.
Mais concrètement, quelles sont les applications actuelles que l’expert-comptable peut tirer de l’IA ?
A cette étape de son développement, la robotisation appliquée à la comptabilité réduit peu à peu à néant les tâches à faible valeur ajoutée telles que la saisie, ou encore l’application de règles de normalisation comme le nommage et le classement de pièces par exemple. Les solutions les plus évoluées auto apprennent de l’expérience des utilisateurs et dans le contexte propre à un dossier client. Plus un algorithme est sollicité, plus il gagne en précision et fait gagner en efficacité le cabinet.
Le bénéfice se mesure assez facilement par le nombre de dossiers qu’un même collaborateur peut gérer. La tenue étant automatisée, le collaborateur concentre son intervention sur les alertes que le logiciel de production lui indique. Ce faisant, il améliore la performance de l’IA. Le collaborateur devient le superviseur d’une production qui se fait automatiquement. Les clients y trouvent également leur compte : des informations disponibles plus rapidement, des données plus précises, des opérations plus fiables, des collaborateurs du cabinet plus disponibles… et ils sont prêts à payer pour cette valeur supplémentaire.
A quelles évolutions faut-il s’attendre pour le métier de l’expertise comptable ?
Les métiers du chiffre sont très performants dans l’explication du passé par l’enregistrement des événements. Avec l’IA, ils entrent de plain-pied dans l’utilisation de la donnée en temps réel.
Les technologies qui automatisent des traitements répétitifs sont en mesure de fournir en temps réel une notification sur une situation anormale ou inhabituelle dans un dossier client. Le collaborateur est notifié de l’apparition de mouvements sur de nouveaux comptes de charge ou de variations fortes dans les éléments de paie par exemple. Il peut alors, après avoir vérifié, contacter son client et l’en informer sans délais avec éventuellement des recommandations. On imagine aisément à quel point la qualité perçue du service fournit aux clients s’améliore grâce à l’exploitation combinée de l’IA et des datas.
A propos des données, quelles sont selon vous les perspectives ?
Les données collectées et traitées par les processus automatiques sont le carburant de l’IA. Sans data, pas d’IA ! Au-delà de cette évidence, il faut aussi mentionner l’intérêt que l’automatisation réside dans la profondeur de l’information et la richesse que l’on peut en tirer. En effet, lorsqu’une pièce est transformée en un fichier, la quantité d’informations explicites mise à disposition de l’IA est supérieure que lors d’une saisie manuelle. Cette finesse sera encore plus grande lorsque la facture électronique deviendra la norme.
Les perspectives sont multiples, je pense que l’on peut les résumer en trois catégories : le pilotage fin et personnalisé, le benchmarking et l’approche prescriptive.
Le pilotage fin et personnalisé est l’exploitation en quasi-temps réel des données d’un dossier client afin de produire des états de pilotage (mesure, comparaison avec un budget et un historique). Ces informations partagées entre le collaborateur et son client favorisent la relation de suivi personnalisé et basée sur des conseils pertinents qu’attendent nombre d’entrepreneurs.
Le benchmarking, ou analyse comparative, est également à portée de main. Pour cela, il faudra savoir mettre en corrélation des informations anonymisées (GDPR et confidentialité oblige), les normaliser pour les rendre comparables et les enrichir pour disposer de critères de sélection permettant de constituer un panel de données représentatives. A ces conditions, les données d’un dossier pourront être comparées à des données représentatives autorisant la lecture de la performance économique dans le contexte d’une activité, d’une géographie, d’une taille d’entreprise, … comparables. On imagine assez aisément, la valeur ajoutée que cette information apportera à une réunion de travail avec un client.
L’approche prescriptive enfin, prendra plus de temps. A cette étape, les données seront la matière première d’une mise en œuvre avancée de l’intelligence artificielle. Le système sait détecter un événement, une tendance, une situation et propose, dans le contexte d’un dossier, des actions possibles et des alternatives. Des applications réelles d’analyse prescriptive existent chez des fintechs et des grandes entreprises dans le but d’améliorer la prise de décision. Nulle doute qu’un jour nous les verrons apparaitre entre les mains des experts-comptables.
En conclusion, pour les cabinets qui mettront en place les solutions nouvelle génération, qui accompagneront la montée en compétence de leurs collaborateurs avec les formations ad hoc, et qui sauront apporter l’information et le conseil nécessaires pour accompagner le succès de leurs clients, alors l’avenir est à eux !