8 mars 2021

La première version de cet article a été écrite et diffusée sur mon compte LinkedIn le 30 décembre 2020. Quand vous lirez cet article, nous serons en mars 2021. A la vitesse où la crise sanitaire évolue, avec son lot d’incertitudes, certains passages vous sembleront peut-être incohérents. Ou au contraire, ils raisonneront plus encore, compte tenu du contexte ambiant. Merci pour votre indulgence.

Les astrologues s’accordent sur la même analyse. Passée l’année 2020, nous serons définitivement débarrassés de la conjonction de Saturne et de Pluton qui a impacté des pans entiers de notre économie. Cet alignement des planètes aura marqué définitivement un tournant essentiel dans l’Histoire de l’humanité. C’est peu dire…
Mais attention, cette fois-ci c’est la grande conjonction de Saturne et Jupiter qui va bouleverser nos vies en 2021. Très attendue des astrologues, celle-ci devrait marquer le début d’une nouvelle ère !
Munis de notre “astrolabe planisphère”, parviendrons-nous aussi à lire l’évolution de la profession d’expertise comptable dans les astres ?
Nous n’avons malheureusement pas les mêmes pouvoirs que les astrologues. Ni prédicateurs, ni cassandres, loin de nous l’idée de prévoir avec précisions l’avenir des experts-comptables pour 2021. C’est pourtant l’exercice un peu difficile auquel nous nous essayons ici avec modestie, au risque de perdre totalement en crédibilité quand, le 31 décembre 2021, nous nous relierons.
Après tout, un partenaire de la profession doit se forger des convictions sur l’évolution de son marché.

 

Commencer l’année par une période fiscale 2021 très intense

C’est certainement la prévision sur laquelle nous prenons le moins de risque ! Pressés par leurs clients et par les banques, les cabinets vont devoir élaborer rapidement les premiers bilans 31.12 COVID. Outre la charge de travail, l’exercice exigera plus d’efforts d’analyses afin de présenter les impacts de la crise sur les comptes. Pédagogie et communication seront les maîtres mots. Les entretiens de bilan risquent de durer un peu plus longtemps avec une partie des rendez-vous consacrée à l’exercice budgétaire. Les périodes fiscales sont traditionnellement des moments intenses pour la profession. Celle-ci ne devrait pas déroger à la règle à un moment où les collaborateurs sont fatigués (stress des clients, télétravail, surcroît de travail…).

 

Printemps 2021 : le rebond des missions d’accompagnement

Tout le monde s’accorde à le dire : à un moment donné, l’Etat va progressivement diminuer les aides et les entreprises vont devoir rembourser les PGE ou bien les nombreux reports de cotisations.

Il va falloir faire la part des choses entre solvabilité et viabilité et c’est à cette période que les défaillances d’entreprises vont “s’envoler”. Mis à contribution depuis le début de la crise en mars 2020, les cabinets vont être assaillis de demandes de la part de leurs clients qui feront face à des difficultés de trésorerie.

Pour les entreprises viables, il faudra étaler les dettes COVID sur des durées plus longues. Et comme l’évoque régulièrement Lionel CANESI, le nouveau président du Conseil supérieur de l’Ordre, une partie des PGE pourrait aussi être transformée en subventions d’État. Il peut être sans doute moins cher de subventionner ces entreprises pour les aider à se relancer, plutôt que gérer un chômage de masse. Quoi qu’il en soit, les cabinets ne manqueront pas de travail et les experts-comptables feront partie des principaux acteurs à la manoeuvre. Les missions de prévisionnel, de tableau de bord, de suivi de trésorerie et de situations intermédiaires vont s’amplifier.

Beaucoup de cabinets fourbissent déjà leurs armes avec des “offres rebond” adaptées. Espérons que ces honoraires de conseils viendront compenser la perte de chiffre d’affaires des cabinets liée à la disparition de leurs clients les plus fragiles.

Certaines études estiment ces pertes entre 5 et 15 % des honoraires des cabinets, suivant la composition des clientèles (CHR, tourisme, arts des spectacles…).

 

Eté 2021 : tensions sur les honoraires et émergence des comptabilités de trésorerie

Il serait fantaisiste, voire absurde, d’affirmer que, passé le 21 juin, les clients vont renégocier leurs honoraires comptables.

Cela dépendra des clients, bien sûr, et surtout de l’offre de services des cabinets. Pour autant, et compte tenu des difficultés évoquées précédemment, on peut imaginer que certains chefs d’entreprise vont être amenés à comprimer leurs charges de partout. Dans ce contexte, et sans missions d’accompagnement de pilotage, il sera plus difficile d’expliquer les apports réels d’une comptabilité d’engagement par rapport à une comptabilité de trésorerie. Avec des tarifs plus attractifs, la comptabilité de trésorerie “boudée” jusqu’ici par les professionnels du chiffre, risque de connaître un certain essor (coûts de production divisés par deux). La technologie est là et la facilité à récupérer les flux bancaires a aidé l’émergence d’offres disruptives envers les BNC ou les entreprises individuelles (ex : Georges.tech). La crise risque d’ouvrir le spectre de ces offres à une clientèle plus large, celle des B.I.C…. Les disrupteurs sont en embuscade. Rappelons-nous que la majorité des entreprises ont moins de 5 salariés !

Enfin n’oublions pas que les OGA se cherchent une “nouvelle vie” et que la tenue de comptabilité pour les indépendants est une piste sérieusement exploitée par ces organismes. Mais la menace ne viendra pas que de l’extérieur.

Beaucoup de cabinets se penchent sur des offres de comptabilité de trésorerie comme réponse idoine aux demandes des clients pour qui le prix est un critère déterminant. Il ne manquerait qu’un relèvement des seuils pour faire pencher la balance…

 

Septembre 2021 et le début des grandes manoeuvres…

Certains analystes estiment que la fin du tunnel sanitaire est prévue pour la rentrée de septembre 2021. Cette échéance serait bien sûr concomitante avec la généralisation du vaccin anti-covid. Accrochons-nous à cette perspective qui permettrait à chacun de nous de reprendre une vie quasiment normale. Après un repos d’été bien mérité, les experts-comptables pourront un peu souffler et commencer à (re)penser à eux-mêmes, à “leur cabinet”. La crise aura indéniablement mis en exergue le rôle majeur des experts-comptables mais la profession ne ressortira pas “indemne” de cette crise.

Comme pour l’ensemble des secteurs d’activité, elle devra se réinventer. Pour le moins, la crise aura naturellement accéléré les mutations engagées avant le début de celle-ci. Avant de repartir de “plus-belle”, on risque d’assister à un mouvement de regroupements et de consolidations. Certains professionnels épuisés céderont progressivement leur cabinet à de plus grosses structures. Beaucoup de professionnels rejoindront des groupements ou des réseaux pour ne pas rester seuls. Mais ces derniers seront contraints d’apporter de vraies méthodes de travail, des outils, des services et des supports marketing à leurs membres. Les cotisations devront être mises en regard d’un véritable retour sur investissement.

 

Hiver 2021, l’épilogue d’une crise, le renouveau !

Rien ne sera plus comme avant !… Les cabinets vont être amenés à évoluer dans une logique de marché déjà bien amorcée avant la crise. Le terme de “logique de marché” est très souvent associé, par beaucoup d’experts-comptables, à une logique de concurrence exacerbée animée par le seul esprit de profit au détriment de normes de qualité. Il n’en est rien.

Comme tous les secteurs d’activité, cela signifie qu’il faudra choisir sa cible, ses missions et ses prix. Le terrain de jeu est immense car la segmentation ne se limite jamais à une clientèle de proximité. Les opportunités sont là mais il faudra faire preuve de courage car les transitions demandent beaucoup d’efforts.

Après la numérisation des processus de production, dont le seul impact réside dans les gains de productivité, les cabinets vont pouvoir s’exercer à la digitalisation des offres de services et de pilotage. Evidemment, la maîtrise des flux et de la data seront au coeur de chacune des stratégies retenues.

La profession d’expertise comptable ne disparaîtra pas même si certaines pratiques vont se marginaliser (syndrome des drogueries). Bien au contraire, elle va se réinventer : bienvenue dans l’ère de “l’expert-comptable augmenté”.

En décembre 2021, les experts-comptables auront plus que jamais les yeux tournés vers l’avenir avec de magnifiques défis à relever.

 

Et après…

La rédaction d’un horoscope annuel est un exercice délicat…

Celui d’un horoscope décennal appartient au domaine de la prophétie !!!

Mais sans avoir recours aux techniques de Nostradamus, il y a fort à parier que les horoscopes futurs se dessineront autour des thématiques suivantes :

» L’évolution des besoins clients et la pression grandissante des disrupteurs,

» Les élections présidentielles de 2022 puis l’assouplissement progressif de l’ordonnance de 45,

» La montée en puissance de la facture électronique,

» La libéralisation de la profession et le désengagement progressif de l’Etat,

» L’incursion massive des banques,

» L’avènement des hypers spécialistes…

Quelle que soit sa forme, nous ne doutons pas un seul instant du rôle prégnant de l’expert-comptable et de son utilité omniprésente pour l’économie de notre pays.

Rendez-vous dans un an, pour relire cet article !

Et merci par avance pour votre bienveillance.

Jérôme CLARYSSE, Président de RCA, Fondateur de la Communauté des Experts en gestion

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