24 février 2017

Selon les résultats de l’enquête sur le marché de la profession comptable, réalisée en 2014 par l’Observatoire de la Profession Comptable, 43% des clients TPE/PME attendent des services dans le domaine du contentieux et du recouvrement. 58% sont en attente de conseils en gestion de patrimoine. Le besoin le plus fort exprimé dans cette enquête est l’assistance et la recherche d’informations juridiques, fiscales et sociales avec 74% des répondants ayant choisi cette proposition. Ces attentes, témoignées par les entreprises clientes des cabinets d’expertise-comptable, rejoignent bien la nécessité de fournir une gamme de services élargie grâce à l’interprofessionnalité.

Le client éprouve des besoins de conseils très variés : se protéger contre un risque de redressement fiscal ou contre un risque de litige avec un salarié par exemple. Pour répondre à ses besoins, il est régulièrement amené à solliciter l’avis de plusieurs professionnels avec des compétences différentes. Ces consultations se font souvent de manière séparée, à charge pour le client de synthétiser tous les conseils recueillis. Cette manière de procéder peut entraîner des incohérences dans les décisions prises ainsi qu’une perte de temps pour le client qui doit traiter de matières qu’il ne maîtrise pas.

Pour pallier à ces difficultés, le chef d’entreprise est depuis longtemps demandeur d’un « guichet unique ». Cet argument a d’ailleurs été avancé dans tous les rapports officiels en faveur de l’interprofessionnalité. Grâce à ce système, le client entend gagner en temps et en efficacité. Il souhaite ainsi que les informations soient directement échangées entre les professionnels pour ne plus avoir à jouer le rôle d’intermédiaire. Sur des missions transversales comme la transmission d’entreprise, le dialogue entre professionnels est impératif afin que les décisions ne soient pas morcelées et soient traitées en harmonie. Ce confort apporté dans la gestion des projets clés du client permettra à coup sûr de fidéliser les clients qui deviennent de plus en plus exigeants en termes de sécurité et d’optimisation.

En théorie, cela paraît évident mais en pratique comment conduire une mission interprofessionnelle en remplissant tous ces objectifs ?

L’échange d’informations, le partage des tâches et les délais de traitement sont les principales difficultés qui pèsent sur la conduite d’une mission interprofessionnelle. Pour veiller à la bonne circulation de l’information entre chaque professionnel, il est nécessaire de mettre en place un système de communication efficace, gage d’une bonne réactivité et de l’engagement continu des acteurs.

Pour ce faire, les professionnels ont intérêt à s’appuyer sur le numérique. Plus précisément, une plateforme collaborative ou « workflow » permettrait d’y arriver. Une plateforme de ce type est un outil numérique permettant de travailler de façon collaborative avec le client et tous les intervenants du dossier. Aujourd’hui, le numérique permet de ne plus travailler de manière séparée. Grâce à ce portail, les parties prenantes à la mission interprofessionnelle ont accès en temps réel à tous les éléments du dossier via un identifiant et un mot de passe. Le client a la possibilité d’y déposer ses pièces justificatives de même que chaque professionnel intervenant au dossier. Les éléments sont ainsi partagés et les délais sont raccourcis.

Outre l’échange dématérialisé, d’autres fonctionnalités peuvent être incluses dans le portail. Le suivi de la mission peut également être réalisé grâce à une planification et à une validation croisée des tâches. Par exemple, si l’expert-comptable partage son agenda sur cette mission et dépose son compte-rendu sur le portail, l’avocat est alerté en temps réel et peut le consulter en avant-première de sorte à prendre connaissance de ses recommandations et inversement pour les travaux de l’avocat. Leurs travaux sont ainsi traités en harmonie et le risque d’incohérence est réduit.

L’idéal serait que les professionnels puissent modéliser les flux d’informations dans le workflow. Ainsi pour une mission donnée, la plateforme fournirait les étapes à suivre pour la réalisation des tâches ainsi que les informations à obtenir et les délais à respecter. Un modèle de démarche pourrait ainsi être créé pour chaque type de mission. Par exemple : un modèle pour la transmission et un autre modèle pour la reprise d’entreprise. Bien entendu, ce modèle devrait pouvoir être adapté selon les spécificités du client.

A l’image des quelques exemples présentés ci-après, ce mode de travail est innovant et sera certainement en plein essor dans les prochaines années. Ce procédé commence déjà à se démocratiser. On le trouve notamment chez Expert & Finance, partenaire de l’ANECS et du CJEC, qui a lancé Expert & Box en mars 2015, plateforme d’échange de documents et de travail collaboratif sur les dossiers en commun avec leurs partenaires experts-comptables. Il est accessible en SaaS grâce à une simple connexion internet. L’hébergement de la plateforme se fait en France et son accès est sécurisé avec un niveau de sécurité bancaire et des codes d’accès spécifiques pour chaque partenaire expert-comptable. Cet outil répond à la mobilité des intervenants puisqu’il est accessible sur tout support mobile. Il assure également le suivi de la mission par l’expert-comptable qui obtient une vue d’ensemble en temps réel sur le dossier grâce à un reporting régulier. Cet outil a été labellisé partenaire associé du 70e congrès du CSOEC.

D’autres professions sont réceptives à cet outil numérique. Le cabinet B&H avocats a remporté le prix 2014 de « l’Innovation des Avocats en Relation-Clients » grâce au développement d’une plateforme collaborative de ce type pour réduire le temps de traitement des dossiers. Leur plateforme est accessible pour le client et pour les autres intervenants du dossier et accélère le temps de classement et d’organisation. Elle évite de mettre un professionnel en position de bloquer l’avancement du dossier par manque de réactivité dans la transmission des pièces. L’outil permet également de planifier des réunions et de préparer des listes de tâches par intervenant. Cet usage numérique encourage l’esprit collaboratif.

La clé du succès de l’interprofessionnalité ne réside pas simplement dans la réunion d’un avocat et d’un expert-comptable en un même lieu. Encore faut-il l’organiser pour répondre aux besoins du client et accroître sa satisfaction. Le numérique permet d’aller dans ce sens et ouvre ainsi de formidables opportunités pour développer le travail collaboratif et organiser l’interprofessionnalité. L’expert-comptable et ses partenaires doivent démocratiser ces outils modernes et numériques afin d’améliorer l’échange d’informations et le temps de traitement des dossiers.

 

Eva DE FREITAS, expert-comptable

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