15 novembre 2018

Afin de mieux comprendre les évolutions de notre profession, Données Partagées est allé à la rencontre de femmes et d’hommes qui nous connaissent bien, qui portent un regard pertinent sur notre métier et dont la libre parole apporte un éclairage différent.

 

Monique MILLOT PERNIN, vous êtes expert-comptable et commissaire aux comptes depuis 1990, date à laquelle vous créez votre cabinet. Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Diplômée depuis 1975, j’ai en effet créé, dans les années 1990, un cabinet orienté principalement vers l’audit légal et contractuel et les études financières et juridiques, dans les domaines notamment public et parapublic, avec une forte spécialisation reconnue dans les secteurs associatif et culturel, avec des collaborateurs de haut niveau. Le cabinet s’est rapidement orienté vers les secteurs suivants : cinéma et audiovisuel, culture et mécénat, logement social, associations et collectivités locales et territoriales. C’était à l’époque novateur et difficile stratégiquement, mais j’estimais que je devais prendre certains risques et me démarquer d’autres cabinets plus structurés et importants, mais de ce fait souvent moins souples et réactifs. De plus, je souhaitais m’engager avec mes collaborateurs au service de l’intérêt général, persuadée que nos convictions et notre enthousiasme nous entraîneraient vers une belle réussite professionnelle, au regard des efforts et compétences techniques que nous avions réunis.

 

Vous avez toujours exercé des responsabilités dans les instances professionnelles, « afin de mieux suivre l’évolution de la profession et de défendre les intérêts des professionnels et de la transparence financière » avez-vous déclaré. Quelle est votre vision du paysage professionnel actuel et comment voyez-vous son évolution ?

J’ai en effet exercé des responsabilités dans les instances professionnelles en m’impliquant très tôt syndicalement, pour mieux accompagner l’évolution de la profession et défendre les intérêts professionnels et échanger avec mes confrères. J’ai ainsi été Membre du Bureau puis Vice-présidente de la Compagnie régionale des commissaires aux comptes de Paris, de 1995 à début 2003.

Elue Membre du Conseil National de la CNCC pendant 8 ans, j’ai également été Membre du Bureau du Conseil national pendant 6 ans, première femme élue dans ce cénacle en 1999 quand il n’était pas encore question de parité. Ma vision du paysage professionnel actuel est liée à mon expérience acquise et à mon implication dans le cadre de la mission sur l’avenir de la profession de commissaire aux comptes, dite “Mission de Cambourg”.
Nommée le 9 mai 2018 dans un contexte d’accompagnement de la modification des textes régissant l’audit légal des PME, je ne peux qu’être déçue et frustrée des approches actuelles des politiques, qui ne prennent pas assez en considération l’apport de notre profession pour la sécurité financière et des transactions, au regard de nos responsabilités civiles et pénales.

 

Dans cette mutation complète, quelle est, à votre avis, la place de l’expert-comptable et la place du commissaire aux comptes ?

Actuellement, la place de l’expert-comptable comme d’ailleurs celle du commissaire aux comptes, connaissent une mutation profonde et doivent d’autant plus être coordonnées et complémentaires. L’irruption de la digitalisation aujourd’hui et demain de l’intelligence artificielle bouleverseront nos métiers. Il faudra que les professionnels et leurs collaborateurs développent des capacités de réflexion et de jugement, en plus de leurs connaissances techniques. L’exercice du commissariat aux comptes va se trouver plus concentré dans certains cabinets et pour des structures importantes et/ou définies légalement. Nous avons le devoir de préparer les jeunes à ces mutations et de les anticiper, dans l’intérêt de leur avenir et celui de l’économie de notre pays.

 

Votre cabinet est orienté vers la culture, le mécénat mais aussi les associations et le social. Vous avez présidé le Comité d’Audit de la Banque de France, le Comité Financier de la Fondation pour la Recherche Médicale pour ne citer qu’eux. Vous êtes membre de nombreuses institutions comme l’Institut Messine ou encore l’Association Droit et Commerce. Dernièrement, vous vous êtes fortement impliquée dans la commission de Cambourg ? De quel engagement êtes-vous la plus fière ?

Ce dont je suis la plus fière est d’avoir, avec quelques difficultés à l’époque, créé la “Journée des Associations et des Fondations”, regroupant chaque année plus de 600 confrères et qui va prochainement inaugurer sa 13e édition, le 17 octobre. Mon but était d’alerter mes confrères sur l’importance du secteur associatif dans toutes les régions françaises, afin de développer nos missions et servir l’intérêt général puisque de nombreux français sont de généreux donateurs pour l’ensemble de ces associations. Je souhaitais non pas les former, mais les informer sur les points essentiels à connaître et les évolutions des textes dans ce secteur.

Je suis également assez fière de mon engagement bénévole auprès de la Fondation pour la Recherche Médicale en tant que Trésorier, Présidente du Comité Financier et d’Audit et Membre du Conseil de Surveillance pendant de nombreuses années. J’ai ainsi pu contribuer à une meilleure lisibilité et transparence des comptes pour l’ensemble des donateurs et partenaires de cette Fondation d’importance.

Pour terminer, je voudrais dire que ma carrière est assez atypique pour un commissaire aux comptes puisqu’ancien Membre du Conseil Général et du Comité monétaire de la Banque de France et Présidente de son comité d’audit, je suis actuellement Membre du Collège de l’ACPR nommée par le Président du Sénat Gérard LARCHER et Présidente de son Comité d’audit jusqu’en 2020.

 

Quels conseils donneriez-vous à un jeune professionnel qui s’installe actuellement ?

Les conseils sont toujours difficiles à donner pour être pertinents ou aider utilement, mais je dirais aux jeunes professionnels : “Entreprenez avec enthousiasme sur ce que vous aimez ou que vous sentez bien faire, surtout ne négligez jamais la gestion interne car la bonne gestion financière (facturation, prix de revient) est le nerf de la guerre et permet d’avoir l’esprit libre pour s’impliquer sur les dossiers. Ne vous laissez jamais abattre par une difficulté ou un client compliqué et trouvez les approches adaptées, sans prendre de risques inconsidérés et lourds ensuite de conséquences, et quel que soit l’environnement alors vous réussirez !!! Nous exerçons un beau métier, sachez valoriser votre compétence et accompagner le dirigeant au plus près de ses préoccupations qu’elles soient stratégiques, de gestion ou liées à l’intérêt sociétal.”

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