8 septembre 2017

Cher(e) stagiaire,

J’ai décidé de t’écrire quatre lettres, tout au long du mois de septembre, avec l’objectif de te donner mon ressenti et mes conseils après deux années de mandat en tant que président de l’ANECS. Tu es jeune expert-comptable et commissaire aux comptes stagiaire et, sans le savoir ou presque, tu viens d’intégrer pour longtemps notre belle profession.

Pour cette première lettre, je te parlerai de la vie en cabinet. Durant deux années, je suis allé à la rencontre des stagiaires aux quatre coins de la France et il en ressortait toujours le même constat : quand on intègre cette profession, on commence tout en bas de l’échelle. Qu’importe la taille du cabinet ou le type d’activité, nous avons réalisé les basses tâches. Et je pense sincèrement que c’est une bonne chose, car cela permet, d’une part, de savourer les évolutions à venir mais surtout, d’autre part, de s’assurer que tu disposes bien des bases nécessaires pour les tâches futures. Tous autant que nous sommes, nous trouvons au début que ça ne va pas assez vite, que l’on peut faire plus de choses, que l’on est meilleur que ce que les autres pensent. Mais une chose est sûre, il faudra laisser du temps au temps et ne pas confondre vitesse et précipitation, malgré ta fougue. Laisse les jours passer et tes tâches évolueront avec.

Un autre constat est qu’il te faudra travailler. Je ne rajoute pas volontairement le mot « beaucoup », car cela n’a pas de sens et c’est bien trop subjectif pour avoir une portée générale. Nous sommes dans des métiers exigeants, en contact direct avec une clientèle, ce qui nécessite un investissement personnel conséquent et donc un travail à la hauteur.

Mais si, un jour, l’envie te prenait de te dire que tu travailles trop, je pense qu’il serait intéressant de lire la publication annuelle de l’INSEE sur le marché du travail et de remettre en perspective le malheur de « trop » travailler quand le taux de chômage en France était de 10,1 % fin 2016. À la lecture de cette dernière phrase, tu pourras avoir le sentiment que je ne comprends pas les efforts que tu réalises pour ton cabinet, que je ne sais pas ce que c’est que de venir le samedi matin au travail pendant la période fiscale, que je ne sais pas que les heures supplémentaires ne sont pas toujours payées, que je ne sais pas que ton maître de stage ne reconnaît pas toujours à sa juste valeur ton travail. Mais pourtant, ce sont des choses qui arrivent et ton cas n’est pas malheureusement pas unique. Il faut vivre avec, ton avenir est radieux.

Mais venons-en à la relation avec l’expert-comptable/commissaire aux comptes : il y aurait tellement de choses à te dire tant les situations possibles sont multiples. Le principal conseil que je pourrai te donner est de toujours faire en sorte que ça passe bien, quoi qu’il arrive. Durant mon mandat, j’ai eu parfois l’impression que lorsque les relations se tendaient avec un expert-comptable/commissaire aux comptes, cela pouvait aller très loin (et des deux côtés). N’oublie jamais que tu es toi-même un futur expert-comptable/commissaire aux comptes, c’est-à-dire un futur chef d’entreprise qui aura également à gérer du personnel. Et ainsi, pose-toi toujours la question de savoir si toi, dans sa position, tu n’aurais pas fait pareil.  Parce qu’au final, ton maître stage, ce n’est que ton propre miroir dans quelques années (moins tous les défauts que tu lui trouves aujourd’hui bien évidemment).

Cela m’amène au dernier point : la fidélité. À travers les réunions auprès des instances ordinales ou des syndicats de la profession auxquelles j’ai participé dans le cadre de mes fonctions, j’ai pu rencontrer un certain nombre d’aînés. Ces derniers disent ne pas comprendre la nouvelle génération, c’est-à-dire la notre. Mais je te rassure, les premiers à trouver que « c’était mieux avant » étaient aussi les premiers à se plaindre à leur époque de leur maître de stage. Un jour, quelqu’un me ressortira aussi peut-être cette lettre comme une démonstration de mon côté rebelle, qui sait ..?

Néanmoins, c’est ton maître de stage qui paye (en théorie) la cotisation pour ta formation auprès de l’Ordre durant trois ans et c’est ce même maître de stage qui t’apprend ce qu’il sait (la pédagogie n’est pas nécessairement leur plus grande qualité, mais il y a quand même un transfert de connaissance). Tu considères sûrement cela comme normal, étant donné ton investissement pour le cabinet, mais avant de changer de cabinet, demande-toi ce que le nouveau t’apportera. Car si le cabinet idéal existait, tout le monde le connaîtrait, non ?

Je m’arrêterai là pour cette première lettre. Je pense avoir exprimé tout ce que je tenais à te dire.

 

Peut-être une dernière chose : Crois en tes capacités !

 

Cyrille Reclus
Président de l’ANECS

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