4 novembre 2016

Le 10 février 2016 a été publié au Journal officiel l’Ordonnance n° 2016-131 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations. Ce texte fait évoluer le code civil français relatif au droit des contrats dont, la majeure partie datait du 21 mars 1804 (30 ventôse an XII). En droit français, la validité d’un contrat repose sur le consentement des parties et leur capacité de contracter mais également sur le contenu licite et certain du contrat.

En application depuis le 1er octobre 2016 pour la majeure partie de ses articles, cette ordonnance prévoit que l’expert-comptable doit veiller à ce que ses clients aient mis à jour leur documentation afin de faire référence aux bons articles suite au changement de numérotation. La réforme n’a pas modifié fondamentalement le droit des contrats électroniques mais la structure du code civil fusionne les articles liés aux aspects manuscrit et numérique du contrat.

Les dispositions du contrat restent identiques :

–          Nul ne peut se constituer de titre à soi-même. (Art. 1363)

–          La preuve d’un acte juridique peut être préconstituée par un écrit en la forme authentique ou sous signature privée. (Art. 1364)

–          L’écrit consiste en une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d’une signification intelligible, quel que soit leur support. (Art. 1365)

–          L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité. (Art. 1366)

–          La signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte.

Lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. (Art. 1367)

–          A défaut de dispositions ou de conventions contraires, le juge règle les conflits de preuve par écrit en déterminant par tout moyen le titre le plus vraisemblable. (Art. 1368)

Le procédé d’identification fiable, décrit dans l’article 1367, fait référence au décret publié le 31 mars 2001 au Journal officiel : « La fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée jusqu’à preuve contraire lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique sécurisée, établie grâce à un dispositif sécurisé de création de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l’utilisation d’un certificat qualifié. » Les certificats électroniques qualifiés sont délivrés par des prestataires de confiance répertoriés au niveau de chaque Etat membre. Depuis le 1er juillet 2016, la mise en œuvre du règlement eIDAS permet d’établir un socle commun pour les interactions électroniques sécurisées entre les citoyens, les entreprises et les autorités publiques. La vérification de la signature est donc simplifiée.

Enfin, certaines conditions d’établissement des contrats ont été précisées. Dans le cadre des actes sous signature privée qui constatent un contrat synallagmatique, l’article 1375 prévoit que la preuve ne peut être faite que s’il a été fait autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct, à moins que les parties ne soient convenues de remettre à un tiers l’unique exemplaire dressé. Dans le cas des contrats manuscrits, chaque original doit mentionner le nombre des originaux qui en ont été faits ; cependant, l’exigence d’une pluralité d’originaux est réputée satisfaite pour les contrats sous forme électronique lorsque l’acte est établi et conservé conformément aux articles 1366 et 1367, et que le procédé permet à chaque partie de disposer d’un exemplaire sur support durable ou d’y avoir accès. Cet article fait appel à l’une des spécificités du contrat électronique : une copie d’un contrat électronique est un original. Cette différence avec le contrat manuscrit a un impact majeur dans la gestion des contrats numériques pour les entreprises. Il en va de même pour la plupart des actes authentiques, qui peuvent être dressés sur support électronique. (Art. 1369)

De par la loi, certaines dispositions doivent être respectées pour que les contrats conclus par voie électronique aient une valeur probatoire :

–          La voie électronique peut être utilisée pour tout type de transactions contractuelles ou d’informations sur des biens ou services. (Art. 1125)

–          Ces informations peuvent être transmises par courrier électronique si leur destinataire a accepté l’usage de ce moyen. (Art. 1126) Il est donc possible d’envoyer des factures électroniques mais simplement avec l’accord de la contrepartie.

–          Pour que ces informations destinées à un professionnel puissent lui être adressées par courrier électronique, celui-ci doit communiquer son adresse électronique. (Art. 1127)

–          Les stipulations contractuelles applicables doivent être mises à disposition d’une manière qui permette leur conservation et leur reproduction. L’auteur d’une offre reste engagé par elle tant qu’elle est accessible par voie électronique de son fait. L’offre doit énoncer :

1° Les différentes étapes à suivre pour conclure le contrat par voie électronique ;

2° Les moyens techniques permettant au destinataire de l’offre, avant la conclusion du contrat, d’identifier d’éventuelles erreurs commises dans la saisie des données et de les corriger ;

3° Les langues proposées pour la conclusion du contrat au nombre desquelles doit figurer la langue française ;

4° Si nécessaire, les modalités d’archivage du contrat par l’auteur de l’offre et les conditions d’accès au contrat archivé ;

5° Les moyens de consulter par voie électronique les règles professionnelles et commerciales auxquelles l’auteur de l’offre entend, le cas échéant, se soumettre. (Art. 1127-1)

–          Le contrat ne sera valablement conclu que si le destinataire de l’offre a eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son prix total et de corriger d’éventuelles erreurs avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation définitive.

Il doit accuser réception sans délai injustifié, par voie électronique, de la commande qui lui a été adressée.

Les documents tels que la commande, la confirmation de l’acceptation de l’offre et l’accusé de réception sont considérés comme reçus lorsque les parties auxquelles ils sont adressés peuvent y avoir accès. (Art. 1127-2)

–          Il peut être fait exception des obligations visées aux 1° à 5° de l’article 1127-1 et aux deux premiers alinéas de l’article 1127-2 pour les contrats de fourniture de biens ou de prestation de services qui sont conclus exclusivement par échange de courriers électroniques et les contrats conclus entre professionnels. (Art. 1127-3)

–          Une lettre simple relative à la conclusion ou à l’exécution d’un contrat peut être envoyée par courrier électronique. L’apposition de la date d’expédition résulte d’un procédé électronique dont la fiabilité est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsqu’un jeton d’horodatage est émis au moyen d’un certificat électronique qualifié. (Art. 1127-4)

–          Une lettre recommandée relative à la conclusion ou à l’exécution d’un contrat peut être envoyée par courrier électronique à condition que ce courrier soit acheminé par un tiers selon un procédé permettant d’identifier le tiers, de désigner l’expéditeur, de garantir l’identité du destinataire et d’établir si la lettre a été remise ou non au destinataire. Si le destinataire n’est pas un professionnel, celui-ci doit avoir demandé l’envoi par ce moyen ou en avoir accepté l’usage au cours d’échanges antérieurs. Dans tous les cas, pour présumer de sa fiabilité, celui-ci doit satisfaire aux exigences du décret du 31 mars 2001. (Art. 1127-5)

–          Hors les cas prévus aux articles 1125 et 1126, la remise d’un écrit électronique est effective lorsque le destinataire, après avoir pu en prendre connaissance, en a accusé réception.

Si une disposition prévoit que l’écrit doit être lu au destinataire, la remise d’un écrit électronique à l’intéressé, les conditions précédentes valent lecture. (Art. 1127-6)

–          Lorsqu’est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige, ce dernier peut l’apposer sous forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir qu’elle ne peut être effectuée que par lui-même. (Art. 1174) Sont exclus de ces dispositions les actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions et les actes sous signature privée relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession. (Art. 1175)

–          Lorsque l’écrit sur papier est soumis à des conditions particulières de lisibilité ou de présentation, l’écrit électronique doit répondre à des exigences équivalentes. L’exigence d’un formulaire détachable est satisfaite par un procédé électronique qui permet d’accéder au formulaire et de le renvoyer par la même voie. (Art. 1176)

–          L’exigence d’un envoi en plusieurs exemplaires est réputée satisfaite par voie électronique si l’écrit peut être imprimé par le destinataire. (Art. 1177)

La refonte du droit des contrats va être l’un des moteurs de l’utilisation des contrats sous forme électronique en France et en Europe. Mais l’un des autres atouts de la voie électronique est la facilité de sa mise en œuvre et la rapidité de son exécution, notamment dans les industries où les cycles de vente sont de plus en plus courts.

Victor Gallavardin, expert-comptable diplômé

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