14 mai 2020

Dès le début du confinement, l’ANECS et le CJEC ont été aux côtés des jeunes professionnels pour les aider dans leurs questionnements. Fidèles à nos convictions, nous croyons que la sortie de crise et la reprise ne pourront faire l’économie d’une réflexion stratégique. C’est pour vous aider dans votre réflexion que nous avons rencontré Christophe BERNARD, spécialiste de la gouvernance des cabinet d’expertise comptable. 

A l’heure où nous écrivons ces lignes, nous sommes en pleine pandémie avec l’espoir d’en sortir au plus vite mais sans certitudes ni calendrier précis.

Parler de stratégie en ce moment peut paraître pour le moins déplacé j’en conviens.

Vous vous souviendrez de cette période fiscale qui devait être pire que les autres comme d’habitude. Mais bon, là cela dépasse largement toutes les craintes anticipées !!

Une bonne partie de votre temps a été consacré à monter des dossiers de chômage partiel et d’obtention d’aides diverses dans un monde à la dérive où les bilans sont passés au second plan. Vous vous êtes centrés sur vos clients et c’est bien normal.

Mais il va falloir aussi penser à vous, votre cabinet et vos collaborateurs lorsque vous en avez. Cette épreuve inédite va livrer un certain nombre d’enseignements pour l’avenir en général mais aussi pour votre profession et votre cabinet en particulier. On peut toujours se dire qu’il y aura un avant et un après. Mais, ce que l’on constate, plus que jamais, c’est que l’humain est au centre de l’économie. Il prend ou reprend une position que nul ne peut ignorer. On l’espère tout au moins.

A l’instar de vos clients, certains cabinets vont se retrouver en mode survie et dans ce cas, on ne parle plus de stratégie à moyen ou long terme. Il faut sauver les meubles et s’appliquer à soi-même les conseils donnés à ses propres clients : capter les aides, s’il y en a, préserver la trésorerie, contenir les frais …

Votre rôle, dans cette tempête : tenir la barre et rassurer votre environnement : collaborateurs, clients, famille. Vous n’êtes pas des surhommes ou des surfemmes, mais vous représentez la stabilité. Cela peut être difficile à assumer par les temps qui courent mais on doit préserver l’avenir autant que faire ce peut.   

Pour les autres, plus solides, cette crise va présenter des opportunités à saisir dans un avenir proche, dès sa sortie.

Quel bilan faites-vous de cette épreuve ? Qu’avez-vous observé chez vos clients, vos collaborateurs, vous-même ? Si c’était à refaire, que changeriez-vous ?

Dans l’organisation du travail, tout d’abord. Vous êtes passés, contraints forcés au télétravail, parfois dans la confusion mais également avec de bonnes surprises. Contre toute attente, ça marche !!  A l’évidence, c’est une piste à creuser pour l’après. Travailler à distance nécessite des règles et un management différents pour ceux d’entre vous qui ont des collaborateurs. La planification, le contrôle, le suivi qualité, par exemple, remettent en cause le modèle traditionnel du management présentiel. Le suivi des temps passés peut devenir obsolète et être remplacé par un suivi des tâches. Une révolution pour beaucoup. Le périmètre de l’autonomie doit être revu et adapté en fonction des compétences et de l’engagement de chaque collaborateur. Si vous poursuivez l’expérience, le présentiel et le télétravail cohabiteront. Dans quelle proportion, pour quelles tâches avec quelles personnes ? Cette remise en question de l’organisation du travail, vous ne l’éviterez pas. On a vu que c’était possible. Certains y ont pris goût. Il serait intéressant d’en parler avec vos collaborateurs et de mesurer l’effet sur la productivité, par exemple.

Si vous êtes seuls ou en création, la tâche sera beaucoup plus simple puisqu’elle n’engage que vous.

La dématérialisation a pris tout son sens. Certains de vos collaborateurs et/ou clients y étaient réticents et freinaient des quatre fers. Vous aviez du mal à les convaincre ? La question ne se posera plus et surtout, ne vous la posez plus !! Le pli est pris désormais et il faut la généraliser. D’autant plus qu’elle s’est étendue au conseil. Dans l’impossibilité de rencontrer physiquement vos clients, vous avez mis en place des systèmes pour les suivre de près. La relation client a été fortement impactée. Certains de vos clients refusaient la dématérialisation. D’autres n’avaient même pas d’adresse mail. Les cartes sont rebattues. Ne revenez pas en arrière puisque les faits plaident pour vous. Pas d’alternative pour eux, ils doivent passer au digital. Voilà votre nouvelle base de travail. Votre assurance à la formuler et la présenter sera le gage de votre succès.

Les outils et les méthodes du cabinet ont été mis à l’épreuve depuis le mois de Mars. Ont-ils passé ce test imprévu mais révélateur ? Sinon, quels enseignements en tirer ? Un peu de benchmarking auprès de vos confrères vous éclairera.  Il vous faut des outils efficaces et revoir vos méthodes si nécessaire pour les inscrire dans un environnement digital. Au-delà du choix des outils de communication une question se pose alors : comment valoriser les prestations ?

Vous n’avez pas compté vos heures et votre énergie pour servir, voire sauver vos clients. Lors de cette crise, vous avez apporté des services à forte valeur ajoutée en un minimum de temps. Vous êtes formidables !! Mais, les avez-vous vendu ? Pas toujours et même rarement. Eh oui ! dans l’urgence …

Quelle est la valeur de ces services ? Quelle est la valeur du temps passé ? Tout dépend de l’enjeu bien sûr. L’enjeu était fort. Vous avez « donné » beaucoup de conseil. Et maintenant, que fait-on ? Quelle leçon en tirer, quelle offre du cabinet doit en découler ? Vous devrez repenser votre offre de service en y intégrant et en matérialisant le conseil ponctuel et récurrent à distance.

Cette crise confirme que continuer à facturer au temps passé pour toutes les missions du cabinet est une aberration. Dans certains cas, c’est la prime aux médiocres, dans d’autres c’est un cadeau pour le client. Le « temps passé » est d’abord un critère de gestion interne. Il est de moins en moins un critère de facturation, sauf pour certaines missions inchiffrables à priori. Cela va imposer à certains d’entre vous de concevoir une offre plus structurée, formalisée, de construire une autre base tarifaire, d’intégrer une autre démarche de vente. Savoir produire et vendre votre conseil est vital. Vous ne pouvez plus faire l’impasse.

Alors, inscrivons cela dans le temps. Tout se raccourcit en ce moment. Le long terme, c’est 12 mois !

A court terme, c’est à dire jusqu’en septembre, c’est la survie qui compte. On pare au plus pressé sans hypothéquer l’avenir : l’urgence client (dossiers administratifs divers et bilans), la trésorerie de tous (y compris celle du cabinet) et les vacances si on peut.

A moyen terme, sur le dernier quadrimestre, faire un point stratégique complet, au calme et tirer les leçons de cette épreuve, enraciner les nouvelles méthodes, les nouveaux outils, les comportements des individus (clients et collaborateurs). Cette phase sera particulièrement importante car elle conditionnera l’avenir. Il ne faut pas rater l’occasion. Elle ne se représentera pas. Elle vous propulsera dans l’après, vers 2021 et la suite. On entrera alors dans le long terme !

Bon courage et bon vent !

 

Christophe BERNARD

Associé PHASE 2 CONSEILS

bernard@phase2-conseils.fr

 

Président de PHASE 2 Conseils, Christophe BERNARD interviens depuis 1988 dans les domaines de l’accompagnement des dirigeants et de leur équipe : la définition d’une stratégie, la gouvernance, la production, l’organisation managériale et le développement commercial. Spécialisé dans les métiers du conseil, nos clients sont essentiellement des experts-comptables dans des cabinets allant de 1 à 1000 personnes. Partenaire privilégié des Instances nationales et régionales ainsi que des syndicats de la profession, nous avons accompagné plusieurs milliers de professionnels et formé près de 40 000 personnes dans la profession depuis notre création.

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